Twitch : La captation de l’attention et le travail esclavagiste à la chaine

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    Comment les streamers et leurs spectateurs sur Twitch perpétuent les pires aspects du travail néolibéral et comment tout le monde sera perdant à la fin.

    Après l’article sur l’hypocrisie et l’entre-soi que j’ai remarqué sur Twitch, je continue mon analyse, cette fois, sur le concept que cela engendre et comment ce “métier” perpétue les plus beaux rêves du néo-libéralisme le plus féroce. J’ai encore écouté pendant des heures, des streamers qui racontent leurs parcours.

    Pour m’imprégner de ce nouveau monde, qui semble nouveau, mais au final, il y a juste un maquillage pour cacher un esclavagisme qui ne dit pas son nom. Il y a des personne sur Twitch, qui gagnent très bien leur vie et qui peuvent même s’acheter une maison, créer une société et faire des choses qu’ils n’auraient pas pu faire autrement.

    Cependant, le point commun de tous les streamers, quel que soit le domaine, est qu’ils répètent qu’il ne faut jamais être absent. Il y a des personnes qui n’ont pas pris de vacances depuis 5 ans et plus. Et certains ne s’absentent jamais. Et comme je le disais dans mon premier article, vous avez des gens qui streament en permanence. Même pendant leurs vacances, ils ne peuvent pas s’empêcher de faire des lives.

    Dans l’article, j’expliquais cette obsession par l’addiction d’être sous les caméras et de recevoir des applaudissements. Et même si c’est vrai, l’autre principale raison est que c’est la seule façon de gagner leur vie. Les spectateurs sur Twitch sont dans un nombre limité et la majorité des streaming, puisque justement, ils viennent du même milieu, partagent les mêmes spectateurs.

    Ce qui fait que si on s’absente, même pendant une seule journée, un autre streamer risque de piquer les spectateurs. Les stats sont cruciales pour réussir et la moindre absence implique une perte de 20 à 30 % des abonnés et des dons. Et cela nous ramène au pointage à l’usine ou dans les mines qu’il y avait dans les années 1930.

    Il fallait travailler 7 jours sur 7, sous peine d’être licencié ou de ne pas gagner assez d’argent. Ce qui fait que ces streamers, sans s’en rendre compte, subissent le même rythme de travail que des forçats. Et le fait que Twitch appartienne à Amazon explique cette tendance.

    Le mode de travail à Amazon est très soutenu et il est conçu pour ne jamais laisser les gens, souffler un peu. Il faut constamment enchainer tâche après tâche, afin d’épuiser le cerveau et éviter de penser au système inique qui s’abat sur les streamers. Comme les streamers gagnent leur vie sur les dons et les abonnements et que la moindre erreur peut faire bannir la chaine, alors les streamers sont non seulement très dociles, mais aussi très lisses.

    Le flicage sur Twitch est plus féroce que sur Youtube ou Facebook. Il y a des centaines de modérateurs Twitch qui regardent les chaines et peuvent les bannir s’ils voient une photo ou une parole compromettante. On n’a le droit de ne rien dire. Et c’est exactement de la même manière que la surveillance du patron et ou du superviseur dans les usines d’autrefois. La moindre broutille est sanctionnée immédiatement.

    Et dans la critique du néo-libéralisme, c’est assez intéressant de voir que cette surveillance constante, n’est pas pour améliorer l’atmosphère de la plateforme, non, c’est pour inciter les autres streamers à se tenir tranquilles et à être aussi dociles que possible. Cette docilité et cette lâcheté transforme ces gens, qui se croient être des rebelles et qui donnent l’impression de faire un nouveau métier, en de véritables moutons ou des bénis oui-oui.

    Avec une telle cadence de travail, il n’est pas étonnant que les streamers sont essorés au bout de quelques années. Car pour maintenir la captation de l’attention, il faut constamment divertir. Il faut sans cesser jouer à de nouveaux jeux et devenir de plus en plus une pute pour avoir quelques miettes. Mais à la fin, la créativité s’épuise et le streamer perd tous ses abonnés et donc sa pitance, au bout de quelques années.

    On est clairement dans cette tendance du néolibéral qui consiste à presser les travailleurs comme un citron et à les jeter comme de vulgaires Tampax.

    L’autre face de Twitch est une propagande absolue de la société de consommation. Les pires techniques pour faire consommer les gens et donner de l’argent sont maquillés avec des émoticones, des jeux et d’autres stupidités pour décérébrés. Des milliers d’euros circulent dans les streams, souvent au noir.

    Et pour les marques, c’est une véritable mine d’or. Ils ont trouvé une plateforme où ils peuvent imprimer leur logo et leurs messages débiles, pendant des heures et cela a forcément un impact sur les consommateurs. Ce qui est risible est que ces même spectateurs rigolent en parlant de la télé et des gens qui passent des heures à regarder BFMTV ou Hanouna, alors qu’ils font exactement la même chose avec une participation proche de zéro. Car l’asymétrie est la loi sur Twitch, les streamers donnent l’impression d’écouter leur communauté, mais pour eux, ce ne sont que des stats.

    Un travail de forçat, aucune pause possible, des streamers qui arnaquent constamment leurs spectateurs et ces derniers dodelinent la tête en leur donnant tout leur argent. C’est à la fois triste et pathétique, mais si on prend la grille de lecture du réflexe de classe, alors ce n’est pas très étonnant. La majorité des streamers viennent de la classe moyenne ou bourgeoise et c’est normal qu’ils exploitent les prolos comme d’habitude.

    L’arrivée des politiciens et de la télévision sur Twitch confirme cette analyse, car ces politiciens savent qu’ils ont affaire à leurs électeurs, ceux qui vont toujours voter pour les pires raclures en estimant que leurs rentes seront toujours protégés.

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